Le Ministère public a requis six mois d’emprisonnement avec sursis et un remboursement du double de la somme. A savoir deux milliard trois cent quatre-vingt millions de francs CFA. Tandis que la défense pour qui l’argent n’est pas une marchandise, s'est efforcée de démontrer que l’infraction de contrebande n’est nullement constituée.
POURSUIVI par le parquet de Franceville en matière de flagrant délit, depuis le 19 septembre dernier, l’ancien président de l’Assemblée nationale, Guy Nzouba Ndama, a comparu hier 18 octobre 2022, devant le tribunal correctionnel de Franceville pour délit de contrebande de marchandises prohibée, une infraction prévue par le Code de procédure douanière.
A la barre, le mis en cause a aisément décliné l’origine des fonds d’un montant d’un milliard cent quatre-vingt-dix millions de francs CFA, qu’il transportait lors de son interpellation, le 17 septembre 2022, au poste de contrôle de Léconi. " Je revenais de Boudji au Congo, terminer une transaction de vente immobilière de mon terrain situé à Pointe-Noire. Arrivé au bureau de douane de Kabala, l’agent de douane était absent, j’ai brièvement échangé avec celui de la documentation et je suis passé. Mais au poste de contrôle de Léconi, des gendarmes en civil ont exigé que j’ouvre les valises, mais par prudence j’ai refusé… ", a-t-il déclaré devant le président du tribunal.
" Et pourquoi n’avez-vous pas donné cette version depuis l’enquête préliminaire, car vous avez dit autre chose, et vous n’avez pas justifié le montant que vous aviez en votre possession ", interroge le président. Et le prévenu de répliquer : " Je ne me suis pas senti en sécurité seul face à une marée déchaînée. J’étais dans un contexte où j’étais humilié. J’ai pensé protéger mes documents pour ne les sortir que devant mes avocats. " Dans tous les cas, tout au long du procès, Guy Nzouba Ndama est resté constant dans ses propos, à savoir que les fonds étaient l’argent perçu de la vente de son terrain de Pointe-Noire.
" Mon client se sentait en insécurité, puisqu’il avait plus d’un milliard avec lui. Il avait l’intention de les déclarer mais l’agent douanier était absent de son poste à son arrivée ", insiste le conseil. Le Ministère public, représenté par le procureur de la République près le tribunal de première instance de Franceville, Euphrasie Ayemingui, dans son réquisitoire, a relevé le fait que l’argent n’a pas été déclaré au bureau de douane. Non sans rejeter la pièce justificative des fonds versée au dossier le jour J. Puis, elle a déclaré établi le délit de contrebande et la confiscation de ladite somme.
Le nouveau maître des poursuites fraîchement installé a également sollicité la condamnation du mis en cause à six mois d’emprisonnement avec sursis et un remboursement du double de la somme. A savoir deux milliard trois cent quatre-vingt millions de francs CFA. Pour les trois avocats réunis en conseil de M. Nzouba Ndama, Mes Lubin Ntoutoume, bâtonnier de l’ordre des avocats du Gabon, Martial Dibangoyi-Loundou et Cédrick Maguisset, l’infraction de contrebande n’est nullement constituée. Ils ont démontré dans leurs plaidoiries respectives que la procédure est dénaturée et incohérente compte tenu des procès-verbaux contradictoires de la Douane et de la gendarmerie. " Comment parler de contrebande, alors qu'il ne s’agit que d’une personne devant la barre ? Au regard des dispositions du Code de douane, l’argent n’est pas une marchandise. Aucun article ne permet d’écarter la preuve versée au débat…Dans ces conditions, vous ne pouvez pas rentrer en voie de condamnation. Cet argent est un scellé, à ce titre il ne devait pas être déposé au Trésor, d'autant que le scellé n’a rien à faire au Trésor, mais doit plutôt être présenté à la barre… ", ont plaidé les avocats.
Guy Nzouba Ndama et le conseil qui l’assiste restent suspendus à la décision que rendront Haurelia Kouakélé Otha et ses juges du siège, mardi 25 octobre 2022. Affaire à suivre, donc.
N.O.
Franceville/Gabon