C'est un peu en "eau de boudin" qu'a fini, hier, au palais de justice de Libreville, la session criminelle spécialisée au titre de l'année judiciaire 2019-2020. En effet, programmée pour la journée et très attendue, l'affaire Magloire Ngambia n'a pu être examinée. Encore une fois, serait-on tenté de dire. Car à en juger par le nombre de défections enregistrées, ce dossier est vraiment abonné "aux renvois". Pourtant, rien avant lundi ne laissait présager une telle issue.
Tout semblait, de fait, avoir été organisé par la juridiction pour la tenue de cette audience. En raison de l'éloignement de deux des avocats de l'accusé Ngambia, en l'occurrence Mes Seydou Ndiagne (au Sénégal) et Pierre-Olivier Sur (à Paris), un dispositif technologique avait été mis en place pour remédier à leur absence physique : un moyen de visioconférence permettant à ces derniers de réagir, en temps réel, en apportant les éléments de leur défense. Des écrans géants installés aux quatre coins de la salle, ainsi que de mini-récepteurs devant les sièges du président, du ministère public, du greffier en chef et des avocats, le tout coordonné par une régie.
Mais ce palliatif n'était pas forcément du goût de la défense. Laquelle prônait une défense présentielle, et estimait qu'une défense virtuelle (par média interposé) ne pouvait avoir ni la même valeur, ni le même impact.
S'ouvrant à notre confrère Jeune Afrique à ce sujet, Me Pierre-Olivier Sur déclarait : "Je ne comprends pas que l'on puisse programmer une audience alors que nous, avocats résidant hors du Gabon, ne pouvons prendre l'avion pour plaider notre dossier. Je considère que c'est une manière de non-prise en compte des droits de la défense."
Tournant donc court, l'audience très attendue de l'affaire Ngambia a laissé l'opinion sur sa faim. Elle qui, depuis son déclenchement et le placement en détention préventive à la prison centrale de Libreville de l'intéressé, début 2017, ne cesse de scruter l'horizon pour connaître les éléments objectifs de ce dossier brûlant, où se mêlent détournement de fonds publics, corruption présumée... Avec ce énième renvoi, le sentiment est de plus en plus à la déception.
S'il est cité dans plusieurs affaires de malversations financières, Ngambia sera précisément jugé pour l'affaire de travaux sur l'axe Akieni-Onga. D'un linéaire de 60 km, le tronçon aurait coûté 60 milliards de francs CFA. Les travaux exécutés par le groupe Santullo Sericom ne seraient pas arrivés à leur terme, alors que l'argent avait été bien décaissé par l'État. Il est reproché à Ngambia des surfacturations de l'ordre de 4 milliards de francs dans l'exécution desdits travaux.
E. NDONG-ASSEKO
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